Poésies


La nuit préméditée

Debout crayon
fiché à bouche
silence écrire
plume corps
lign entraves
fiction soli
exil le chant
exit le mot
taire la vie
dérive l’âme

Suis-je force
ou graphe
ironie crampe
du destin
né trop tôt
mort trop tôt
vagabond pris
entre deux âges

Signe d’avant
la nécessité
avant Histoire
avant Image
suis-je Sujet
ou vecteur
ou astre
ou port
ou route

En le sens incertain
une raison solidaire
de la terre immère
ou gravité clouant
au sol mortel
ou la nuit
seule lisse
sans bord
sans cesse

Mais que sait-on
de la nuit sinon
l’intermittence
de l’incréé
de la lumière
son envers
son absence
trous abscons
d’immatière

Qu’est-ce que la nuit
une substance
un vide un écart
un espoir un flot
une tumescence
une turbulence

Et si la nuit
était en moi
comme un
désir de mort

et si la nuit
était partout
matrice d’algues
vague courant et flux
défigurée infigurée
pas même
protubérance

Le mot frappe
à la lucarne
piètre voyeur
sombre témoin
chargé de
sorts venimeux
au conciliabule
mais que faire
d’une fenêtre
quand il n’y a
pas de mur

Vibrations
écho d’émoi
igné aimé
ce peu se terre
tout tremblement
est une signature

Le nom recherché
nom propre à trouver
intime visage
varech déchiffrable
tu ne sais pas le reconnaître
bientôt ne sauras
plus te souvenir
ni parler

Le cri et le visage
assemblent
même identité
présence absence
l’avers et le revers
l’or glisse de main en main
fleuve sans embouchure
l’horizon ne finit
ni ne commence
les rives n’existent
que dans le tremblement
du soleil

Sartre zen

Entre les verres de bière
plume râpeuse verbe bas
et les cordages du port
le marronnier invite
à la rixe des termes
chronie ne les peut contenir
ni l’alcool ni la bière
seul le rien le séduit

Ne rêve pas à océan
mais à la vague orientale
qui ramène au Temps absence
visage projet delà des mers
au blues qui suinte cafés bouges
cloportes et langoustes
suivant sa quête multueuse
éclate le chant des vautours
Guernica tu sous pluie de feu
quand jubile la salaud latin

Il s’évanouit sur les routes
n’accuse pas la fatigue
mais sa propre faiblesse
à tisser une invisible armée
reviens retors invente
la Liberté mais s’évade
dans les dédales de juillet

Où Wols le suit et lui perdu
dans des lianes et racines à forer
entre blattes et scolopendre
les millepertuis de l’existence
s’abîmant sur leurs chemins
dans le feu des grandes barrières
qui brûlent et ne brûlent
en suspens en sursis

Les maîtres et les saints
affluent comme les sages
Mallarmé et Flaubert
mais aussi les démons
Baudelaire et Genet
galerie des glaces brisées
et lui souriant souverain
quelque part à New York
en Chine à Rome à Venise
dans les filets de Jacopo
sa matière démise désossée
transformant l’or en rien
et l’inverse dans les fumées
du cigare et de la corydrane

Inspiration

Écrire dans le miroir Soir
le pas des pigeons
sur le sel des gouttières
ce pas seul m’éternise

Dans l’abord d’Iguazu

Sur la maintenance
de son corps bruni
une indienne rêvait
sa chevelure brume
fluide si fluide
au dédain de l’image
gazouillis des toucans
mille flots son désir
repris lancé repris
démesuré insatiable
a rêvais fleurs blanches
herbes tissées
comme un nid
couronnes épis
morte vivante

Songgwangsa

Les fleurs ne sont pas des fleurs
mais des racines
un moine vient de mourir
en fête lui porte objets et fruits
pour s’avancer dans l’ailleurs
le moine chef sert du thé
son sourire d’écume
semblable à l’eau cascades
la nourriture est chair
pousses sur les champs
et eau et vie et cendres
et l’esprit est fleur et murmure
et ruisseau
pourquoi tant de gaieté
à l’éveil au dharma
pourquoi tant de secret
dans la clarté du vide

Azalées

De chaque côté
escalier de pierre
des milliers de fleurs
ensanglantent l’âme
mais nulle blessure
qu’un peu de frissons
couperosés à l’espalier
du matin

Éclaircissement

Dans le brouillard
ouate temps cyclique
fumier blanc
pour que lève le rêve

Y a-t-il autre chose
que le brouillard

Nous mourrons
nous renaîtrons
de nos traces
à moins que

Y a-t-il autre chose
que du temps
nous venons du fonds
de la nuit notre berceau

notre mystère